avril 24, 2024

LES SCIENTIFIQUES FRANÇAIS

REVUE DE PHILOSOPHIE DE LA PAIX

Problèmes de critique d’art : RETOUR À BOULGAKOV.

Problèmes de critique d’art

RETOUR A BOULGAKOV.

Shanti Jayasekera, réalisateur ( l’Institut national de la cinématographie ou VGIK )

Shanti Jayasekera , Filmmaker, PhD, Grand PhD

A la mémoire de l’écrivain. Ce mois de mars a marqué le 81e anniversaire de la fin de la vie et de l’œuvre de Mikhail BOULGAKOV.

Cependant, son œuvre attire l’attention jusqu’au présent : ses spectacles, comédies musicales et notamment, films auxquels nous avons dédié notre essai. Et aujourd’hui, il y a des projets actuels et ceux à venir pour filmer des adaptations du « Maître et Marguerite » en Russie et à Hollywood.

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Sans diminuer l’importance de telles œuvres remarquables que « Les jours de Tourbine » ou « Le Raid », mentionnons que c’est l’œuvre littéraire « Le Maître et Marguerite », qui a été le plus représentée aux théâtres et dans les adaptations cinématographiques.

Après la première série télévisée réalisée en Finlande en 1970, le roman « Le Maître et Marguerite » a été tourné par le célèbre Andrzej Vaida (1971) et par le Yougoslave Aleksandar Petrović (1972), plus tard par le Polonais Maciej Wojtyszko (1989) et d’autres. Il y avait des films d’animation, notamment en Israël ; on fait des recherches et rédige des mémoires, par exemple, au VGIK, etc.

L’augmentation de la conscience publique s’est produite en 1967 en URSS après la publication du roman dans une revue; la version de samizdat était peu connue. C’est son épaisseur qui a été la raison du succès général du roman: thématisme à multiples facettes, talent et message très émotionne ont créé cette œuvre talentueuse. Il y avait quelques avis négatifs, mais très faibles, surtout parmi les ministres du culte/religieux.

Au fil du temps, l’excitation s’est réduite, mais l’intérêt des critiques littéraires et artistiques est toujours vivant et a pris une place honorable dans « Bulgakovedeniye ».

La scène et l’écran sont devenus une plate-forme permanente pour montrer des interprétations de la littérature de Boulgakov.

Le contenu évangélique du « roman dans un roman » de Boulgakov est devenu un thème éternel dans l’art du cinéma.

En étudiant l’héritage de Mikhail Boulgakov du point de vue de l’histoire de l’art et, surtout, du point de vue de la cinématographie, il est possible de déterminer les caractéristiques et les particularités des adaptations cinématographiques de ses œuvres en basant sur son roman « Le Maître et Margarita ».

À notre avis, outre le contenu informationnel, les questions abordées (même si en passant) dans cet article représentent l’intérêt pour ceux qui étudient l’œuvre de Boulgakov, y compris son interprétation dans l’art du cinéma.

Il est évident que les critiques ont adressé leur attention, évaluation et discussion aux adaptations cinématographiques basée sur les œuvres de Boulgakov. Cependant, il faut examiner les circonstances et conditions individuelles du processus de création cinématographique – cela permet de comprendre ou sert d’exemple des analyses critiques, et même d’un contenu utile d’expérience divulguée dans la production d’œuvres ou de recherches pertinentes.

En même temps, on se contente de décrire les conditions et circonstances que les cinéastes considèrent comme « externes », imposées, ou initiales. (Par exemple, si on parle de l’adaptation d’une œuvre littéraire, alors l’œuvre elle-même est la condition initiale, ou les circonstances de base pour l’adaptation cinématographique). C’est avec ce matériel source qu’il faut commencer la description. Oui, tout le monde le sait, oui, tout le monde le fait. Mais nous voudrions souligner cette approche dans notre système général de conditions pour l’adaptation cinématographique. (Nous soulignons encore une fois que nous ne parlons que des adaptations cinématographiques du « Maître et Marguerite »). Laissons de côté les périodes de la lutte avec le début littéraire au cinéma, les recherches surréalistes et autres « innovantes » qui expliquent le rôle de la littérature dans le cinéma et la signification de leurs propres innovations.

L’œuvre littéraire ressemble à un trésor. C’est à la fois la base du scénario, et la possibilité de combiner sélectivement le texte littéraire selon l’intention du réalisateur, et, enfin, la réalisation du projet de cinématographie.

Il convient ici de citer l’opinion d’Andrzej Wajda, mentionnée dans l’une de ses interviews. (Andrzej Vaida. Le cinéma est ma vocation. Journal isskustv n° 9, 2016).

« Je pense que ce qui est le plus dangereux, c’est le scénario d’impression, que le scénariste ‘voit’ à travers les yeux de sa propre âme. Il s’agit généralement d’une œuvre sournoise et bornée car elle est tissée de la toile de ses émotions. »

Cependant, revenons au début significatif, à l’adaptation cinématographique du « Maître et Marguerite». Il faut comprendre que c’est le Roman lui-même, son contenu, ses mérites littéraires et, surtout, la période de son apparition en URSS (1967) qui ont aidé l’adaptation à réussir étant les raisons principales du succès.

Les problèmes sociaux, la bureaucratie – tout cela n’a pas changé depuis le moment de création du Roman, c’était un bon terrain pour une représentation caricaturale. Et il y a aussi un thème religieux, tandis que le peuple soviétique était tellement fatigué de la sécheresse spirituelle de l’athéisme.

Il est intéressant à noter que même trente ans plus tard quant à l’adaptation cinématographique du roman par Iouri Kara et quarante ans plus tard, pour celle de Vladimir Bortko, leurs films se sont avérés pertinents, d’actualité et attirant au christianisme, bien que le roman lui-même ainsi que les adaptations de l’œuvre sont loin du christianisme canonisé.

Il s’ensuit du texte du roman et des films, que Ha-Nozri avait un père, non, pas le Seigneur Dieu ; sous la direction de Ponce Pilate Ha-Nozri a été enterré sans aucun miracle. (Bon, c’est vrai, le rideau du Temple s’est déchiré, il fallait laisser quelque chose des Ecritures). Après avoir quitté la Terre, le Maître avec sa bien-aimée, accompagnés de Woland et de sa suite, se déplacent à un certain « monde ». Ce n’est pas le Paradis, ni le Purgatoire, mais une sorte de refuge d’un autre monde où on peut vivre en paix pour toujours. Et l’Église ne le savait même pas.

Et pourtant, le Spectateur était persuadé que le film confirmait l’existence du Tout-Puissant, sans parler des Forces du mal.

La position suivante dans l’interprétation d’une œuvre littéraire est la possibilité d’un travail créatif avec le texte original, en fonction de l’intention du réalisateur.

Ainsi, Vayza a réalisé le film « Pilate et autres » (1971) et juste après lui Aleksandar Petrović a fait « Le Maître et Marguerite » (1972). Les réalisateurs se sont limités à l’incarnation de leurs idées sur fond de thèmes religieux et mystiques, bien que le thème évangélique ne soit ici qu’un décor des problèmes modernes.

Il sera logique de montrer comment le même œuvre littéraire peut être à la base de différentes interprétations, différentes expressions des intentions du réalisateur.

L’adaptation susmentionnée du roman d’Andrzej Wajda a soulevé les problèmes de la Pologne socialiste d’alors, les problèmes de liberté et de pouvoir. Le film a été mis en scène en Allemagne. L’auteur a combiné les événements du Nouveau Testament avec le présent : manifestations en Allemagne, Judas trahit Ha-Nozri par téléphone et reçoit aussitôt les fameuses trente pièces d’argent sous forme de monnaie rendue ; autoroute près du Calvaire, le long de laquelle se précipitent les voitures modernes.

Le drame avec Ha-Nozri est l’intrigue du film, influençant la perception, attirant le public.

On peut dire la même chose sur le film d’Aleksandar Petrović. Le contenu du film est simplifié, et il est difficile de mettre en évidence des positions attrayantes dans l’adaptation. Peut-être on pourrait se rappeler de l’expression utilisée à l’époque soviétique à propos de « razvesistaya klukva », sous laquelle les citoyens soviétiques faisaient des confidences aux « chercheurs » occidentaux de l’URSS.

Ainsi, nous avons abordé le problème essentiel de l’adaptation cinématographique – l’actualisation d’une œuvre.

L’actualisation est une caractéristique bien connue et universellement admise pour les œuvres littéraires. Je voudrais préciser comment nous comprenons l’actualisation dans ce texte. Ce sont les circonstances et les conditions prises en compte dans l’adaptation.

Il est clair que la source littéraire doit être actuelle en soi-même.

Et l’interprétation d’une œuvre littéraire – l’adaptation – doit être actuelle, répondre aux besoins du public ou au moins d’une partie d’eux. Comme mentionné précédemment, le réalisateur met en œuvre le projet de film et l’actualise sur la base de la composition sélective de l’œuvre littéraire, ainsi que par circonstances supplémentaires, compétences artistiques et techniques.

Comme on l’a déjà dit, malgré la compréhension bien connue de la catégorie d’actualisation dans l’adaptation cinématographique, nous jugeons approprier de donner notre propre interprétation de cette position.

En effet, il y a des sujets d’actualité « éternelle », comme des sujets religieux ou historiques. Il y a même quelques films muets qui peuvent être classés comme ceux « pour tous les temps ». Les films actuels sont toujours intéressants, répétons-le, ce n’est pas par hasard que Vaida, Petrovich et Voytyshko se sont limités à des thèmes évangéliques.

Et Mikhail Boulgakov lui-même a limité ses premières éditions de son Roman, et ensuite son œuvre, aux événements du Nouveau Testament.

L’explication est évidente: la religion et le mysticisme sont toujours d’actualité, ce sont des « vérités éternelles ». Le choix de ce thème est inratable, prenez, par exemple, « La Passion du Christ » de Mel Gibson (2004), alors qu’un film au même titre et au contenu similaire est sorti en 1905.

Un film historique peut prétendre être actuel s’il porte des idéaux spirituels ou moraux, la lutte pour la liberté et la justice, et bien qu’il s’agisse d’une technique habituelle, pareille à la pub, néanmoins, le « grand public » s’y attend souvent. Cela explique le succès de films prétendument « historiques » tels que « Ben-Hur », « Gladiator » et d’autres.

En parlant d’actualité, j’aimerais considérer une telle caractéristique proche et visant à la perception d’un film par les spectateurs comme « modernité », on pourrait dire « contemporanéité ». Malgré le fait que ces concepts soient généralement perçus comme des synonymes d’actualité, nous leur attachons une signification événementielle lié au moment de la projection d’un film.

Cette catégorie de la cinématographie a son propre « chemin de vie ». Dans le même temps, la modernité peut constituer un outil créatif efficace qui donne du sens et de l’expressivité à certaines scènes ou à une œuvre cinématographique dans son ensemble. Événements et circonstances, dialogues et musique, etc. doivent être compréhensible pour le spectateur. Sinon, le spectateur « rate » la vie à l’écran, ne la perçoit pas.

Par exemple, dans l’adaptation de Bortko, qui est à juste titre considérée comme la meilleure adaptation du « Maître et Marguerite », il y a des scènes qui étaient d’actualité pendant les années de la création du Romain, mais soixante ans plus tard elles sont tout simplement incompréhensibles.

Pas beaucoup de spectateurs connaissent le magasin de Torgsin, à cause de quoi il y avait un scandale dans le magasin, ou en plus, le problème du Maître lui-même – le refus d’être publié – ne semble pas dramatique de nos jours, et les méchants du « Bal de Satan » sont aussi peu connus.

Bortko a bien présenté le roman de Boulgakov sur l’écran, permettant au spectateur lui-même de se repérer dans les problèmes du passé.

Yuri Kara a décidé de mettre en valeur des épisodes individuels. Ainsi, parmi les méchants au « Bal de Satan », Hitler et Staline sont apparus en passant, mais c’est la même chose que « de fouetter un cheval mort ».

Il y a aussi une « cerise sur le gâteau », une beauté nue Vertinskaya, vous pouvez l’admirer, c’est intéressant à regarder, mais quel est le rapport au film ?

Bref, les « ajustements créatifs » du matériel littéraire original : ajouts ou coupures, reflètent l’intention du réalisateur, son imagination, etc. et répondent aux demandes du spectateur. Mais cette explication impose également une responsabilité au réalisateur, comme on le sait. Par contre, certains créateurs des films n’y prêtent pas toujours attention.

Par exemple, dans le film « Morphine » (2008), également basé sur l’œuvre de Boulgakov, le réalisateur Alexei Balabanov introduit une scène naturelle, une copie du scandale authentique de l’épisode « Monica Lewinsky et Bill Clinton ». Et le bon film en général est dévalorisé par cela. Les accros au porno aimeraient cette scène, mais le film « Morphine » appartient à une catégorie morale différente.

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Tenant compte du fait que nous ne considérons que les conditions et circonstances « externes » individuelles de l’adaptation cinématographique et le faisons uniquement du point de vue de l’interprétation d’une œuvre littéraire, notons quand même un aspect organisationnel général qui joue un rôle important dans la création du film.

Considérant la production cinématographique comme une sorte de marchandise, même si c’est intellectuel, nous constatons que dans ce cas-là, la commercialisation de la production cinématographique répond à toutes les règles du marché. (Ce sujet est largement couvert dans la littérature. Actuellement, on juge souvent de la qualité du film en fonction de son box-office).

On ne va pas aller trop en détail, mais on va donner un exemple de présentation de film réussie.

Ainsi, le téléfilm de Bortko a été diffusé pour la première fois avant le Nouvel An sur la chaîne 1 de la télévision russe, lorsque tous ceux qui dépendent de la télévision (et nous en dépendons tous d’une manière ou d’une autre), sont devenus des téléspectateurs.

Cette remarque ne déprécie à aucun moment ce film vraiment merveilleux.

Mais en même temps, cette anecdote peut servir d’exemple pour la référence d’organisation qui achève la sortie des films